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Dark Magus

Dark Magus est un très très court métrage (10 secondes) de Julien Merlin, présenté en 2016 au Plus Petit Festival du Monde à Strasbourg. L'habillage sonore est de Bertrand Merlier.

Bruits et Musique

Le résultat final est présenté dans la vidéo ci-contre. Les étapes intermédiaires (musique, bruitages) sont commentées ci-dessous.

Le problème est de gérer au mixage l'oppulence des matériaux présents : une musique riche et variée, connue, porteuse de sens, jouant le mickey-mousing et une quantité importante de bruitages.

 

La solution adoptée est le non-mixage.

 

  • Sound Design : Live Ableton
  • Esthétique musicale : collage et mickey mousing.
  • Composition : centrée sur les bruits.

Analyse du film

Un sorcier arrogant, égocentrique et plutôt teigneux, tente d'envoyer des sorts afin d'arrêter le temps qui s'écoule. Mais ses modestes pouvoirs se retournent généralement contre lui. L'échec est flagrant, puisque le mage est transformé en coucou suisse (mais sous la forme d'une chauve-souris).

 

Mots-clés : sorcier, magie, sorts, humour, échec, temps, horloge, coucou suisse...

Il peut être utile de relire la fiche sur les 10 fonctions de la musique de film de Sophia Lissa.

Demandes du réalisateur

De la musique : des instruments tels que de l'orgue, du clavecin, du hautbois...
De "vrais" bruitages et/ou du mickey mousing.

Divers cris sympathiques mais étranges.

Le réalisateur énumère ensuite chaque détail de l'animation :

- bruit du sable qui tombe ?

- bruits de frottement sur le sol (déplacement du mage qui avance)

- cri « déchirant » du magus voyant le sablier

- bruit du sortilège qu’il prépare et lance

- apparition de l’horloge ?

- tic tac du pendule (+ petit bruitage de l’aiguille qui recule ?)

- bruitages de la transformation en chauve souris

- bruitages de la re-matérialisation en magus (+ œil qui tombe)

- lutte avec l’aiguille, celle-ci qui flanche puis aspiration vers le centre du cadran

1) L'habillage musical

Il ne s'agit par d'une composition originale, mais d'un montage-collage réalisé à partir d'un emprunt historique : L'Apprenti-sorcier de Paul Dukas (1897).

Ce choix est justifié par le contexte : chez de nombreux auditeurs un tant soit peu cultivés, la référence est explicite et immédiatement évocatrice.

N'importe quelle autre musique (originale ou pas) n'aurait pas pu traduire le titre (Dark Magus) en un temps aussi bref. Et dans le cas présent, le compositeur ne dispose que de 10 secondes pour se faire comprendre.

Les découpes et le collage sont guidés par l'animation afin d'obtenir les effets de mickey mousing demandés par le réalisateur.

La proposition musicale répond donc aux mots-clés : sorcier, magie, sorts, ainsi qu'à la demande de souligner les principales actions par la musique.

2) Les Bruitages

Les bruitages sont en partie issus du site web freesound.org et en partie fabriqués.

Le site freesound permet de gagner un temps appréciable lors de la fabrication dans des délais toujours serrés, alors que les bruitages fabriqués apportent une touche personnelle.

 

Aucun bruit n'est utilisé à l'état brut.

Grâce à l'éditeur audio de Live Ableton, chaque fichier est "usiné" en intensité, en rythme et en durée, en hauteur (transposition et accordage avec les autres bruits), en timbre (filtres et warp grâce à l'outil hyper puissant de timestretching).

Technique de non-mixage

Musique et bruitages sont placés dans des espaces différents.

a) les bruitages sont très précis ou présents, situés dans un espace sec, donc au premier plan.

b) la musique possède globalement le même niveau sonore que les bruitages, mais elle est dotée d'une réverbération moyenne.

Cette réverbération a pour conséquence de "flouter" légèrement la musique, de la situer dans une grande pièce et à une certaine distance de l'auditeur.

L'oreille perçoit donc 2 types d'espaces, 2 lieux différents, 2 types de sources sonores à des distances différentes (proches et plus lointaines). Elle sépare instinctivement les 2 types de messages sonores.

D'un point de vue psychoacoustique, il n'y a donc pas de mixage, mais juste une balance équilibrée entre 2 sources de natures différentes qui ne se mélangent pas.

Sans la réverb sur la musique, toutes les sources seraient dans le même espace ; le mixage serait alors possible, générant une bouillie sonore.

 

Note : la piste musique provient d'un enregistrement d'instruments réels, captés dans une salle de concert. La réverbération ajoutée sur la musique ne fait qu'accentuer cet "effet de salle". Dans le cas d'une musique originale réalisée avec des banques de sons, les instruments virtuels sont généralement très présents et très proches. Il faudrait alors une bonne dose de réverbération afin d'obtenir les mêmes effets de floutage et de distance.