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Bruit et musique : la bonne amplitude / Analyse d'un contre exemple

L'image ci-dessous représente la forme d'onde de la piste bruitage d'un film d'animation destiné à être joué en ciné-concert par un petit orchestre symphonique. Nous expliquons ci-dessus ce qui ne va pas (et qui est parfaitement visible à l'oeil).

L'analyse est volontairement visuelle (il n'y a rien à écouter), car elle souhaite montrer qu'il est imprudent de se passer d'une vérification visuelle du signal audio avant la "livraison".

amplitude

Analyse (auditive et graphique) de la piste bruitage

Le film se déroule en bord de mer. La première moitié de la piste bruitage et le dernier quart consistent en du vent et un bruit de ressac : donc du bruitage à spectre large qu'on peut apparenter à du bruit blanc.

La partie centrale contient divers chocs : lancer de caillou, porte qui claque, escalier, cris d'enfants ou de mouettes agressifs...

 

L'analyse acoustique du fichier son donne :

- amplitude crête max : -0,10 dB

- amplitude RMS moyenne : -43 dB

- dynamique de l'ensemble du signal : 60 dB

- dynamique dans les zones hors chocs : 30 à 40 dB

 

Les divers chocs de la partie centrale occupent la totalité de l'amplitude disponible (-0,10 dB). Ils ont très probablement été protégés par un limiteur qui a empêché d'atteindre la saturation : c'est très bien !

A cause de ces pics, il n'est pas possible d'amplifier plus le signal.

 

Les 2 pics à 0dB font croire que les bruitages ont une amplitude élevée et que la piste bruitage (dans son ensemble) possède un bon niveau sonore, alors que l'analyse (visuelle ou physique) des niveaux sonores fait apparaître une amplitude RMS moyenne de -40 dB.

 

 

Cours : Il peut être utile de relire la fiche sur le mixage et le bon usage de la compression.

1) Inaudibilité de la majeure partie des bruitages

Dans le cadre d'un ciné-copncert, la piste bruitage doit être amplifiée et mixée en direct avec l'orchestre.

 

Si le technicien sonorisateur cale son amplification sur les pics de la partie centrale, les bruits de vent et de ressac ne seront pas entendus (sur les 3/4 de la durée du film) parce que leur amplitude moyenne se situe à - 40 dB. Seuls les chocs de l apartie centrale émergeront face à l'orchestre.

Si le technicien sonorisateur compense manuellement ces niveaux faibles (ce qui n'est pas cool pour le technicien et qui est dangeureux pour les oreilles et le matériel compte tenu des sautes d'amplitude importantes : 40 dB), un autre problème va surgir...

2) La concurrence entre bruit et musique

Si le technicien monte le son des bruitages, ceux-ci feront office de brouillage vis à vis de l'orchestre, à cause de la concurrence spectrale.

Parce qu'un orchestre symphonique possède un spectre large, parce les bruits du vent et du ressac possèdent eux aussi un spectre large.

L'écriture des bruitages est concurrentielle avec celle de l'orchestre, si elle n'a pas été intégrée dans une pensée musicale globale.

 

Ce genre de mixage relève de la gageure (même en studio).

 

Les solutions

a) L'écriture de la musique est indissociable de celle des bruitages.

Sauf volonté expresse de fusionner ou de générer des ambiances sonores ambigues, l'écriture des instruments et des bruitages doit être diversifiée, voire opposée. C'est-à-dire : présenter le plus de différences possibles, afin d'être facilement différentiable à l'écoute.

Si le bruit est tenu (comme le vent ou le ressac ou des bruits mécaniques), un jeu instrumental rythmé, saccadé, piqué... sera mieux perçu.

Au contraire, si le bruit est ponctuel et percussif, un jeu instrumental tenu sera bien diférencié.

Les tessitures et spectres des bruits et des instruments seront les plus différents possibles.

 

b) La piste bruitage ne peut pas être conçue après l'écriture instrumentale.

Les bruitages énumérés (vent, ressac, mouettes, escalier...) sont imposés par le film.

Compte tenu du point a) (exposé ci-dessus), la présence impérative du vent et du ressac sur les 3/4 du film induit des contraintes sur l'écriture instrumentale : sur les rythmes, le phrasé, le choix des instruments, l'orchestration...

C'est un aberration totale d'écrire la musique instrumentale, puis de fabriquer la piste bruitages.


c) L'amplitude de la piste bruitage doit être soignée (voire compressée) afin d'être entendue.
Les bruitages doivent rivaliser avec un orchestre d'une quarantaine d'instruments.
Si la première moitié du film est jouée par une flûte traversière seule, alors les niveaux du bruitages sont corrects.

Si ce même passage est joué par un ensemble conséquent d'instruments, alors le niveau du vent et du ressac doivent être amplifiés en conséquence.

L'usage d'un compresseur est vivement recommandée, dans la mesure où ce dispositif permettra de garantir une bonne inteligibilté du bruit.